Après avoir oeuvré avec talent sur des jeux de plateforme, Naughty Dog a connu une nouvelle stature via l’ère des consoles HD grâce à Uncharted, sa série la plus vendue, mais aussi grâce à The Last Of Us, une nouvelle licence lancée en fin de vie de la PS3 qui a su multiplier les récompenses. Les périples vécus par Nathan Drake et le duo Joel – Ellie sont différents, bien qu’on puisse à chaque fois les ranger dans la catégorie action-aventure. Uncharted est apprécié pour sa démesure tandis que The Last Of Us a principalement conquis via sa narration. Et en mettant aux commandes d’Uncharted 4 Neil Druckmann et Bruce Straley, respectivement Creative et Game Director de The Last Of Us, Naughty Dog s’est servi de l’héritage de Joel & Ellie pour donner un nouveau souffle à la dernière aventure de Nate.
Note: Cet article ne contient aucun spoiler sur Uncharted 4 ou The Last Of Us.
Débuté à l’origine sous les ordres d’Amy Hennig et de Justin Richmond, le projet Uncharted 4 a finalement changé de main pour se retrouver sous la direction de Neil Druckmann et de Bruce Straley, occasionnant au passage le départ du duo qui avait autrefois officié sur Uncharted 3, et de celui de quelques acteurs alors évincés ou peu satisfaits par ce remplacement. Cela a au final abouti sur le Uncharted 4: A Thief’s End que l’on connait, un jeu qui rappelle The Last Of Us à bien des égards. L’histoire de ce quatrième épisode majeur se vit ainsi essentiellement à deux. Au cours de son périple, Nathan Drake est rarement seul ce qui lui permet, lorsqu’il n’est pas pris sous le feu ennemi, d’échanger sans relâche avec son partenaire du moment. Cela rend l’aventure plus vivante, mais cela donne aussi l’occasion d’en apprendre davantage sur chacun des personnages, voire même de nouer ou de renforcer certains liens. On retrouve la même justesse de dialogue que dans The Last Of Us, tandis qu’à certains moments, un simple jeu de regard peut vouloir dire beaucoup de choses.
La narration passe aussi par des conversations optionnelles et une prolifération de petites notes, toutes repérables à travers de petits cercles blancs, les mêmes que dans The Last Of Us. Eparpillés un peu partout, ces documents reviennent de manière globale sur le scénario de cette aventure ou livrent des anecdotes sur divers personnages. Forcément, toutes les discussions évoquées plus haut et la recherche/lecture de ces lettres influent sur le rythme qui est bien plus lent et plus posé qu’autrefois. La durée de vie du jeu est de ce fait plus longue et le sentiment d’explorer des zones ouvertes plutôt que de simplement les traverser est plus présent. En de nombreux lieux, la nature a d’ailleurs bien souvent repris ses droits; la végétation a envahi les anciennes colonies bâties jadis par les pirates, et les hautes herbes se multiplient. Outre rappeler une nouvelle fois certains passages de The Last Of Us, cela donne du charme aux endroits visités, mais aussi des possibilités pour se cacher et éviter les rondes des gardes.
Légèrement mise en avant dans Uncharted 2 et 3, l’infiltration est bien plus poussée dans cet épisode sous-titré A Thief’s End. Dans The Last Of Us, les éliminations silencieuses étaient nécessaires car les munitions étaient rares et que combattre un trop grand nombre d’ennemis pouvait vite devenir ingérable. On retrouve à peu près le même genre d’idées dans U4, sauf qu’ici, Nate n’a pas de surin et il est capable de bondir un peu partout pour échapper aux balles. Ses alliés peuvent aussi afficher dans certains cas la silhouette des ennemis proches, telle Ellie autrefois, et lorsqu’il s’agit de tirer sur des ennemis, on retrouve les mêmes indications visuelles quand un ennemi est touché au corps ou à la tête. N’oublions pas non plus que les partenaires de Drake portent en permanence le totem de l’immunité lors des phases d’infiltration.
Avec Uncharted 4, Naughty Dog a bien entendu réutilisé une partie de son travail effectué sur The Last Of Us en ce qui concerne la gestion de notre fidèle allié. Il y a toutefois eu quelques ajustements puisque contrairement à Joel, Nate est un expert de la grimpette. De même, avec le système de couverture. Drake et son partenaire du moment peuvent ainsi partager le même petit abri, comme Joel et Ellie autrefois, mais les animations diffèrent cependant, les gabarits des personnages n’étant pas les mêmes. Au niveau de la progression dans le jeu, le fait le plus marquant, outre le rythme, reste ces fameuses caisses à roulettes qu’il faut souvent déplacer d’un point A à un point B afin de prendre ensuite de la hauteur. Pour l’anecdote, Naughty Dog a retiré de nombreuses caisses et autres courtes-échelles pendant le développement d’Uncharted 4. Si ces passages peuvent parfois sembler répétitifs, ils sont, selon Neil Druckmann, indispensables afin de renforcer les liens avec son allié du moment.
Enfin, l’inspiration de The Last Of Us se ressent sur le multijoueur. Celui d’Uncharted 4 reste dans la lignée des précédents avec un tempo élevé, mais il reprend néanmoins deux points clefs du jeu sorti en 2013. S’il n’est pas question de devoir confectionner ses propres bombes, il est désormais nécessaire de valider chacun des frags effectués. Après avoir mis au sol un ennemi, ce dernier a la possibilité de ramper, de se cacher ou de se rapprocher d’un allié pour ensuite être réanimé. Autre grand changement, une boutique virtuelle est présente au cours de l’affrontement en ligne. L’occasion alors d’acheter des armes ou de demander l’appui de mercenaires contrôlés par l’IA, le tout, grâce à l’argent récolté à chaque frag ou aux trésors récupérés sur la map.
En lui empruntant une partie de ses mécanismes de jeu et de sa narration, Uncharted 4 n’est pas subitement devenu une sorte de suite de The Last Of Us. La dernière aventure de Nate se rapproche certes de celle de Joel, mais elle reste encore différente sur de nombreux points. Un peu moins de dix ans se sont écoulés depuis la sortie du premier épisode, et il est finalement normal que la série des Uncharted ait évolué en même temps que ses auteurs.