Killzone n’a jamais su prendre son envol. On pensait la série de Guerrilla sur de bons rails après l’excellent deuxième épisode, mais le 3 a montré que rien n’était jamais acquis d’avance. Trop classique, pas assez ambitieux et empruntant trop à ses concurrents, KZ3 n’a pas su confirmer tous les espoirs placés en lui. Désormais sur une nouvelle console, cette suite perd son chiffre 4 au profit d’un simple sous-titre. Killzone Shadow Fall a des faux-airs de reboot et se présente comme un nouveau départ pour la série. Quid de l’atterrissage?
Trente années après les événements de Killzone 3, la planète Vekta est désormais divisée en deux avec d’un côté les Vektans (l’ISA) et de l’autre, les Helghasts. Au centre se dresse une immense muraille visant à séparer ces deux peuples qui, tant que bien que mal, essayent de cohabiter. Mais les tensions subsistent, les risques d’attentats sont grands, chacun ignore si demain existera. Killzone Shadow Fall met donc de côté les guerres de tranchée pour proposer, à la place, de l’infiltration qui tâche, en ligne ennemi. Le style diffère pas mal des précédents épisodes et perd en intensité avec des combats moins violents mais qui gagnent en liberté d’action. Exit les couloirs et autres arènes cloisonnées, le level design est ici plus intéressant et moins dirigiste avec des zones souvent plus ouvertes proposant des approches multiples. Les affrontements se font également en solo; Rico n’est plus là et il est finalement remplacé par le OWL, un chouette drône pouvant attaquer, défendre, étourdir ou bien créer une tyrolienne, histoire d’atteindre des plate-formes en contre-bas, inaccessibles en l’état.
Killzone fait donc sa petite révolution en laissant la possibilité aux joueurs d’aborder les situations de plusieurs manières. Cela n’est malheureusement pas toujours exploité à fond et on est même fortement limité par l’arsenal. Notre Shadow Marshall ne peut ainsi transporter que 2 armes à la fois, mais seule la seconde peut être troquée contre une autre. C’est assez illogique et même frustrant lorsque l’arme principale (dont le design et l’aspect sonore sont discutables) n’a plus de munitions et que l’on doit quand même la garder. De même, impossible de choisir son équipement avant de partir au combat et il est donc question, la majorité du temps, d’employer la manière forte. Un peu de diversité n’aurait pas fait de mal. Cela reste des défauts mineurs, mais ça montre surtout que la mue n’est pas encore complète. Cela dit, les bases, sont là.
Les bases, c’est forcément la prouesse graphique. Killzone 2 et 3 étaient en leur temps impressionnants, Shadow Fall est tout simplement parfois incroyable. Le travail abattu par Guerrilla est colossal et certains passages frôlent la folie. Killzone Shadow Fall est un jeu de lancement mais n’en porte pas les stigmates. Les temps de chargement sont invisibles, le détail est omniprésent, les arrières plans hallucinants et la direction artistique totalement maitrisée. K:SF définit un nouveau standard graphique sur console; une véritable claque qui réussit à procurer une excellente immersion. Le gameplay du jeu est en revanche plus classique. Les zones sont plus ouvertes, mais les mécanismes de jeu demeurent assez traditionnels. La formule fonctionne bien, même très bien à certains moments, mais on garde cet aspect de déjà vu. Le titre de Guerrilla a somme toute du mal à se défaire de son image de shooter classique à l’enrobage divin.
Killzone Shadow Fall garde donc ce côté conventionnel mais a le bon goût de parfaitement réussir ce qu’il propose, c’est à dire un jeu très bien rythmé et des affrontements tenaces. Le système de couverture est bien entendu à nouveau présent mais est moins utile qu’auparavant. On ne peut plus se pencher et, surtout, les adversaires ne cessent d’essayer de contourner le joueur. Les affrontements sont donc plus dynamiques et il faut sans cesse se déplacer ou utiliser son OWL pour créer des diversions ou se protéger. L’IA peut aussi avoir des moments d’absence et masque certaines de ses carences via une omniscience venue d’on ne sait où. Il est par ailleurs aussi possible de vider une zone entière sans que cela puisse surprendre les soldats placés dans une salle voisine. Bref, une intelligence artificielle dans la lignée de ce qui se fait de nos jours et qui n’en reste pas moins un redoutable adversaire pendant les 9h de jeu nécessaires pour voir le bout de l’aventure.
Naturellement, le passage à la next-gen n’a pas supprimé les velléités en ligne, à 60FPS qui plus est. Le mode multi de Shadow Fall ressemble d’ailleurs à son solo : quelque chose de classique, complet et avec quelques bonnes idées. La meilleure d’entre elles est sans aucun doute de proposer directement toutes les armes du jeu en libre accès. Il n’est donc plus nécessaire de jouer xx heures afin de débloquer les meilleurs fusils pour humilier les nouveaux venus réduits à des armes à l’efficacité contestée. Pour le reste, on dénote 10 maps aux environnements et reliefs variés. Comme pour la campagne, ce sont les affrontements rapprochés qui sont favorisés avec des cartes certes assez grandes mais aux espaces souvent confinés. Les affrontements peuvent donc vite devenir bourrins mais on note quand même quelques grains de tactique dans ce monde de brut avec les capacités spéciales liées aux classes : tourelles, points de réapparition, camouflage optique. . . Cela n’empêche bien évidemment pas les jets aléatoires de grenades ou les tête-à-tête avec des fusils à pompe, mais face à une équipe bien organisée, il faut souvent savoir modifier ses stratégies. A ce sujet, on retrouve une nouvelle fois le très bon mode Warzone et ses objectifs divers comme des contrôles de zone, du CTF ou du TDM qui permettent de tonifier l’action et de délocaliser les zones de combat. Mieux encore, on peut entièrement créer sa propre Warzone en sélectionnant ses modes de jeux et en gérant énormément de paramètres comme le niveau de santé de chacun, les armes autorisées, les munitions etc.
Malgré ces bonnes trouvailles, il est toutefois là encore difficile de trouver une immense originalité à son multi. Après tout, Killzone Shadow Fall reste un vrai jeu next-gen de lancement. Next-gen dans sa réalisation, beaucoup moins dans son gameplay. Killzone est assez classique mais il demeure véritablement prenant et même surprenant en s’éloignant des codes de la série pour les faire évoluer. Peut-être pas encore assez pour devenir le porte-étendard du jeu de tir sur console, mais assez pour rester l’une des valeurs sûres de ce lancement de la PS4.
Killzone Shadow Fall est développé par Guerrilla Games et édité par Sony Computer Entertainment. Jeu sorti le 29 novembre sur PlayStation 4. PEGI 18.